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Lyon, le 27 septembre 2013

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BERCEUSE
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                                                  - Voici ma brume ! dit le Couchant.
Fais d’elle des draps frais, m’ami,
ou de moelleuses couvertures.
Récolte aussi de mes couleurs,
Elles te raconteront mon silence.

- Voici mon noir ! dit la Nuit.
Fais avec lui ton lit, m’ami.
Cueille quelques étoiles
pour rêver ton demain,
Puise dans ma lune aussi :
elle y coulera de la rondeur

                                                               - Et maintenant, m’ami,
                                                                love-toi dans mes bras et dors… dors…
                                                                                                        © Michèle Rodet
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Lyon, le 7 septembre 2013

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Du signe… au symbole
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Les littéraires ont une façon bien à eux d'entendre et d'employer certains mots. A plus forte raison, les littéraires linguistes. C'est qu'ils sont enracinés non seulement dans un corpus de langues et de textes qui remontent à Homère, mais aussi dans la manière dont fonctionnent langues et langages, et encore dans l'usage que les humains font de la parole. Les littéraires linguistes tiennent ces trois dimensions d'une même main, comme un conducteur de char à trois chevaux le ferait avec les rênes de son attelage : la difficulté réside non pas dans la posture bien qu'elle demande de l'adresse, mais dans le fait de conduire chacun des chevaux dans la même direction !

Michèle Rodet : Tissâge (détail)
Comment donc utilise-t-on des mots comme "signe" et "symbole" dans ce domaine ?
Le signe est l'unité de base d'un langage. Le signe, et non le mot ou la phrase. C'est une unité qui participe de la construction d'un langage dans la mesure où il produit de la "signification", et partant, du ou des sens. Le signe est le matériau qu'emploie un écrivant ou un parlant pour "faire signe" - pour alerter autrui, lui "signaler" qu'il veut lui parler - et pour faire sens.
Pour produire du sens, il faut au moins deux signes. En effet, si je dis : "sud", dans l'absolu, cela à une signification mais pas de sens. Le sens de sud ne vient que si je le place en rapport avec "nord" ou "est", par exemple. Si je suis un navigateur, ma route changera radicalement de sens si je dois aller "sud-nord" ou "sud-est". Et la direction de mon véhicule en sera affectée.

Et bien, il en va de même avec le langage. Le mot "blanc" par exemple, possède en lui-même quelques significations intrinsèques - de couleur ou d'absence de couleur - mais son sens ne provient que du rapport avec un autre signe : si je relie "blanc" à rouge ou rosée, alors je "désigne" le vin dont je parle. Si je le relie à "jaune", "noir" et "rouge", alors je désigne une couleur de peau et j'évoque une manière de penser l'humain. Etc.
Michèle Rodet : Tissâge - 2010 - (1,40 x 0,85)
En donnant du sens, le signe désigne ! Le parlant affecte un mot ou un groupe de mots à la chose - perceptible par nos sens - qu'il met en lumière ou qu'il montre d'une part, et d'autre part à ce qu'il pense ou à comment il pense. C'est une sorte d'interface.
Je peux encore employer le "blanc" pour parler de quelque chose qui n'est ni matériel ni perceptible par les sens, mais qui concerne tout humain. Le blanc symbolisera alors, selon la culture, le mariage, le deuil, la pureté… etc. Le signe gagne ainsi un nouveau pouvoir, celui de symboliser ; c'est-à-dire de manifester - à travers un élément perceptible - des réalités non perceptibles par nos sens, des réalités qui concernent notre intériorité et nos relations avec les autres.
Lorsqu'un signe acquiert la dignité du symbole, il devient pour les uns un code, pour les autres un langage. 
Mais à propos, le mot "symbole", d'où vient-il, que signifie-t-il et à quels sens a-t-il donné lieu ? 
                                                                                            © Michèle Rodet
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Lyon, le 25 août 2013



 
  

MARÉES


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Dis-moi, m’ami,
dis-moi pourquoi
cette marée d’humains
sur mes plages ?



   Moi qui connais les secrets de la lune
   et l’ardente fidélité du soleil,
   moi qui connais le chant des sirènes
   les passions du roc et la tendresse des sables,
   j’ignore pourquoi tous ces amants…

           Que sont ces inconstants   
           qui s’en viennent le temps d’un été    
           pour s’unir à mes eaux,   
           qui, sans un présent, sans un serment,   
           souillent mes rivages, puis s’en vont ?   

 Dis-moi, m’amour,    
toi qui vient me rendre visite    
en toute saison,    
lesquels de mes charmes    
les envoûtent-ils ?     
© Michèle Rodet    

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Lyon, le 12 août 2013


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       ... de lumière et de nacre ...
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Mes libellules       
aux élytres d’or, volez       
pour relever l’air       

 Mes libellules,       
 bijoux d’ailes frémissantes,       
révélez le ciel !        
    
 © Michèle Rodet            
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Lyon, le 2 août 2013


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-        Promis ?

  Aujourd’hui,  
  dans le frémissement
  de la lumière du matin,
  on dirait 
  que tremble la promesse
  d’une bonne nouvelle

Les prés respirent l’innocence

Les colombes devisent en paix

  Ah ! Si ce matin
  pouvait 
  se réjouir déjà
  de mon élargissement !
                       © Michèle Rodet
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Lyon, le 13 juillet 2013

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VESTIGES
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De vos naufrages
je rassemble les débris -
    Qui étiez-vous donc ?
          © Michèle Rodet 



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Lyon, le 29 juin 2013

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  BAIGNADES
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  Je me suis baignée
  dans la saignée du temps
  un clair de lune
  
            © Michèle Rodet


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Lyon, le 18 juin 2013

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           S'ÉCRIRE
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           Les hirondelles
        écrivent au ciel en noir, 
    les étoiles en or
 

- Lac, recommence
les pages que les rafales
de vent ont froissées

Tu les enverras
lorsque les airs et les eaux
 auront fait la paix


     - Calme, Lumière,
         mon onde te prêtera
              sa limpidité
                   © Michèle Rodet
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Lyon, le 7 juin 2013


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Allez ! 
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Quel est le merle
qui refuserait 
de chanter
de peur de déranger
le soleil ?

    La feuille
    craindrait-elle
    de blesser l’air
    quand le vent
    l’invite à danser ?

     - Bénis ! Oh ! Bénis le monde,

          murmurent à l'unisson la lumière et le souffle,

           - Chante, m’ami humain, 
                           tant qu’il est temps, 
                                         n’est-ce pas là ta liberté ? 
                                                                                            © Michèle Rodet
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Lyon, le 29 mai 2013

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        RAGE
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- Fières fougères

aux crosses fabuleuses !

          crache l’orage

                                      © Michèle Rodet