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Lyon, le 19 mai 2010 – Le conte que j’écris…

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Voici la situation et les personnages du conte que j’écris : deux fillettes et leur père, veuf, qui se remarie. Bien qu’il ne rejette pas ses enfants, ce père est incapable de les accompagner et, à fortiori de les soutenir au cours du chemin qui mène de l’enfance à l’âge adulte. La belle-mère n’éprouve qu’indifférence pour les fillettes, de façon qu’elles se sentent bientôt indésirables dans la maison de leur père. D’où de nombreuses questions pour ces enfants, qui pourraient se résumer à travers celle-ci : comment trouve-t-on une place pour soi sur terre lorsque l’on n’a pas de « maison » ?

Question d’une brûlante actualité pour nombre d’enfants, surtout pour les filles qui sont encore de nos jours peu investies, socialement parlant, par les pères. Au-delà de la blessure intime infligée aux enfants ainsi traités, se posent très vite pour eux de nombreuses interrogations auxquelles il est urgent de trouver réponses : celles-ci concernent les points de repère spatio-temporels, la sécurité intérieure, le corps avec sa cohorte de sentiments et d’émotions qui en passent par les sens, la découverte puis l’apprentissage de la « navigation » dans l’espace social… Et tant d’autres questions encore…

Le conte que j’écris s’appuie sur ces questions en les « traduisant » en fils, broderies et motifs empruntés aux contes traditionnels. Traduction à laquelle j'ajoute tout ce qui est nécessaire pour que la trame du conte tienne et maintienne le lecteur d’aujourd’hui en haleine…
S’adosser à l’art du conte et aux savoir-faire reçus en héritage permet de ré-ouvrir le grand livre de la vie, de manière à en poursuivre l’écriture, à établir des liens et à jeter des ponts entre naguère et maintenant… de sorte que demain d’autres mains, d’autres cœurs puissent le feuilleter encore et encore, avant de prendre à leur tour la plume.

Le conte que j’écris commence ainsi :

« Il était une fois un monarque riche et puissant. Il adorait la chasse, les festins et le théâtre de sorte que les fêtes qu’il donnait étaient réputées jusqu’aux confins de la terre. Lorsqu’il avait atteint l’âge d’homme, il avait été couronné roi de Midi et avait épousé la fille unique du roi des Quatre-Vents. Neuf mois après leurs noces, la reine donna le jour à une fille : elle reçut le nom de Clairevoix. Sept ans après, le jour de Noël, la reine enfanta une seconde fille. Elle fut nommée Aireine.

Or, il arriva que la reine s’éteignît alors qu'Aireine n'avait que sept ans. Cependant, avant de rejoindre le royaume des ombres, elle avait fait mander les princesses et avait murmuré à l’aînée :
- Clairevoix, chère enfant, tu as reçu le don du chant. Je te donne en héritage ce diapason d’or. Fais-en usage pour bâtir ton bonheur.
A la cadette, elle avait soufflé :
- Aireine, chère enfant, tu as reçu le don de la présence. Je te donne en héritage ce cahier d’or. Fais-en usage pour bâtir ton bonheur.
Lorsque la reine des Quatre-Vents eut rendu son dernier souffle, le roi de Midi s’abîma dans le chagrin. Inconsolable, il délaissa les affaires de son royaume, ses fêtes et ses chasses. Pendant tout un an, il pleura. Durant une autre année, il s’enferma dans son deuil, vêtu de noir et s’alimentant de peu. Pendant la troisième année, il erra : il partait en forêt ou s’embarquait, solitaire, sur un petit voilier. Il posait distraitement la main sur la barre et voguait, de-ci, de-là, au gré du vent. Il se nourrissait d’oursins et de coquillages, buvait l’eau de pluie. Et lorsque le vent le ramenait au port, il regagnait sombrement son château.
Et voici que le premier jour de la quatrième année, un courant mena son bateau dans une île perdue de la Méditerranée, une île si minuscule qu’elle ne figurait sur aucune carte… Cette île n’abritait qu’une seule maison, qui n’hébergeait qu’une seule personne, une femme qui répondait au nom de Micra. Or la dame de l’île était un peu sorcière… »

Albepierre, le 11 mai 2010 - Point sur la Fête du livre à Villeurbanne

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Mes amies Marie-France CHEVRON et Aurélie BOISSINOT
dans la salle d'exposition
de la maison du livre de Villeurbanne
La fin de semaine dernière, s'est déroulée la Fête du livre jeunesse à Villeurbanne, aux portes de Lyon, au cours de laquelle était organisé un salon du livre jeunesse.
Un salon, c'est l'occasion de retrouver amis et complices, de découvrir des auteurs, des illustrateurs et des éditeurs - ainsi que leurs ouvrages - et, parfois, de les rencontrer...
C'est aussi une agréable façon de se tenir au courant des mille et une nouvelles qui forment le réseau très fluctuant des courants sur lesquels les artistes naviguent.
L'édition de cette année avait pour thème RÉSISTER, date (le 8 mai) oblige. Mais loin de se cantonner dans la mémoire historique de l'événement - aussi essentielle fut-elle - ou dans un militantisme gauchisant, l'équipe de la MAISON DU LIVRE, DE L'IMAGE ET DU SON, avait fait une large place à l'humour. L'humour, la plus sûre et la plus durable des armes contre toute forme d'oppression, qu'elle soit politique, sociale, familiale, transgénérationnelle...!
La programmation était si riche qu'il ne m'a pas été possible de tout voir, tout entendre... Cependant parmi les artistes invités, j'ai été particulièrement sensible à la représentation donnée par PLONK et REPLONK sous le titre "Le Rezizistan, république oubliée", ainsi qu'à leur exposition d'images et d'objets. Voici des artistes qui savent jouer des situations, de la langue - le suisse roman, si chantant - et de l'image en virtuoses... Je suis encore toute vibrante des éclats de rires qu'ils ont déclenchés... et de la joie de découvrir que de nouveaux chantres ont repris - et portent haut et franc - le flambeau de la liberté. Et avec quel esprit !

Christian HUMBERT-DROZ, sérigraphiste et éditeur,
notammant de la revue DROZOPHILE
Parmi les éditeurs, une heureuse rencontre : celle de Christian HUMBERT-DROZ, artisan-éditeur suisse, aussi, qui vit de la sérigraphie. Or ce passionné ouvert aux artistes et sensible à leurs oeuvres trouve de plus le temps d'éditer, entre autres, une revue intitulée DROZOPHILE (!) avec eux, publiée et imprimée - de nuit ou durant les périodes creuses dans son atelier, à Genève... - uniquement en sérigraphie !
Si ! Si ! Et si la fidélité à lui-même et à ce qui mobilise son coeur n'est pas toujours payant - je veux dire en espèces sonnantes et trébuchantes - du moins fait-il ce qui lui plaît !
Rien que pour avoir entendu ces paroles - et avoir vu le visages ouverts, concentrés et joyeux des étudiants des Beaux-Arts ou des jeunes artistes venus le seconder - cette fête valait le déplacement.
D'avoir parlé et côtoyé ces très belles personnes, ainsi que leurs oeuvres, m'a donné courage, énergie et idées pour poursuivre ma route.